De Song kol à Osh


De son kul à Osh



- A travers les montagnes arides -

du 11 au 16 septembre 2016 Kirghizistan 603 km

Après les pâturages verdoyants du lac Son kul, nous descendons vers la vallée désertique de Naryn, puis la frontière Ouzbek pour rejoindre Osh.


On quitte Son Kul

C'est sur la rive sud du lac Son Kol que nos routes se séparent, juste après un dernier moment de convivialité à déguster le kumiz : Violaine et Magali continuent vers l'ouest alors que nous poursuivons vers le sud. 

C'est alors que le vent de face se lève et rend notre progression beaucoup plus difficile que prévue. Le passage du col Moldo Ashuu qui ne devait être qu'une formalité s'éternise. Mais au moins, on profite au maximum des paysages magnifiques du lac et des dernières yourtes qui bordent la piste.
Campement de yourtes dans la montée au col Moldo Ashuu
Campement de yourtes dans la montée au col Moldo Ashuu
Une fois le col passé, le paysage change radicalement : plus sec, plus rocailleux et avec des conifères, paysages que nous n'avions pas encore vu jusqu'ici. La descente est vertigineuse, mais la vue, sous la lumière de fin d'après midi, splendide. La fatigue commence à se faire sentir : la piste devient plus mauvaise et après une chute bénigne, Élise craint chaque virage. La descente est longue, très longue sur cette piste instable et poussiéreuse. Deux camionneurs en pause dans la montée nous proposent des shots de vodka. Non merci, sans façon!

 

Heureusement ceux là on les descend!!
Heureusement ceux là on les descend!!

Le fond de vallée ne nous faisant pas rêver pour planter la tente et l'appel de la douche étant plus fort que tout, on tente de rallier le prochain village avant la nuit. Il nous reste moins 2h et près de 30 km à parcourir. C'est fou comme on peut trouver de la ressource, même au fond du seau. Élise avance à près de 30 km/h, sans réfléchir, la tête dans le guidon et les yeux dans la roue de Nico. A cette vitesse, sur cette piste pourrie, la moindre erreur peut entraîner la chute. Mais on tient bon. Même les gros toutous qui nous courent après en aboyant tout ce qu'ils peuvent ne nous font (presque) plus peur. Élise a appris à piler pour leur crier dessus encore plus fort. En général, Nico en profite pour ramasser des cailloux, juste au cas où. Jusqu'à présent, ça s'est avéré être une bonne tactique et ils nous laissent généralement rapidement tranquilles. Nous arrivons à Jangi Talap avant la nuit : défi relevé, il ne nous reste plus qu'à trouver un endroit où dormir.

Les derniers km avant Jangi Talap, on se dépêche le soleil va bientôt se coucher!
Les derniers km avant Jangi Talap, on se dépêche le soleil va bientôt se coucher!
Ne sachant pas où aller, on va demander au (seul) magasin du village s'il existe une guesthouse. Ils nous proposent quasi immédiatement de dormir chez eux et de partager le repas d'anniversaire du papa avec eux. Mais d'abord, le traditionnel thé. Ici, il est souvent préparé dans une petite teillère, très concentré. On n'en sert qu'un fond de bol et on complète ensuite avec de l'eau chaude. Ça permet d'avoir du thé prêt pour toutes les occasions, puisque le moindre prétexte est bon pour en boire. Aktilet, le fils de la famille a étudié à l'université turc de Naryn et parle plutôt bien anglais, ce qui facilite les échanges. Il nous demande ensuite si nous sommes végétariens puisqu' au menu de ce repas de fête, c'est mouton bouilli. On réfléchira peut être à 2 fois avant de répondre non, la prochaine fois... Des amis et de la famille sont là pour l'occasion, et pourtant, ça semble être un honneur pour eux de nous compter également parmis les invités. On déchante un peu quand on voit les plats arriver avec TOUT le mouton : des côtes, oui, mais aussi la tête, les poumons, les trippes, les pattes, l'estomac fourré aux patates et carottes... De quoi en rendre végétarien plus d'un. On appréhende la distribution des morceaux mais on s'en tire finalement pas trop mal : ce sera des cotelettes pour Elise et un gigot pour Nicolas. Le tout est accompagné d'une soupe au gras et de beshbarmark, des nouilles avec de la viande de mouton, l'un des plats traditionnels kirghize (l'article Wikipedia résume bien le rituel que nous avons pu observer). Et bien sur, des bouts de trippes, de poumons, de gras,... circulent dans des bols pour que tout le monde puissent profiter des meilleurs morceaux! Élise a passé son tour sur les morceaux les plus étranges, sous le regard amusé de nos hôtes. Nous sommes de nouveau touchés par la générosité et l'hospitalité des Kirghizes. De quoi nous redonner le moral après cette journée fatiguante.
Aktilet et sa mère dans le magasin familial
Aktilet et sa mère dans le magasin familial

A travers les régions les plus reculées

Les pistes de la vallée de Naryn, qui relie Jangi Talap à Kazarman puis Jalal Abad sont un vrai calvaire. Elles nous secouent comme des bouteilles d'orangina et les graviers qui les recouvrent manquent de nous faire déraper voire tomber très régulièrement, si bien que notre progression est très lente et le moral plutôt bas. Est ce le contrecoup d'avoir quitté les filles, la fatigue des jours précédents dans les montagnes,...? Les pauses se multiplient et Élise est au bord du craquage. On décide alors de tenter le camion stop. Mais encore faudrait-il qu'il y ait des camions... Voila 2 heures qu'on pédale et on en a pas vu un!

Les montagnes arides et sculptées par l"eau entre Jangi Talap et Kazarman
Les montagnes arides et sculptées par l"eau entre Jangi Talap et Kazarman
La délivrance arrive enfin au cours d'une Nième pause : camion en vue! Et quel camion! Il s'agit du camion/bus des étudiants allemands que nous avions déjà croisés à l'arrivée au lac Son Kul. On charge les vélos sur le toit et nous sommes chaleureusement accueillis dans le bus. Nous passerons le reste de la journée avec eux, à sillonner les magnifiques vallées arides, les canyons, les montagnes aux versants erodés. La piste parcourant de vraies montagnes russes, nous sommes ravis de franchir les cols à bord de ce camion. Le soir, nous bivouaquons en bord de rivière, à une vingtaine de km de Kazarman avec nos sauveurs du jour. Nous sommes couverts de poussière (on vous a dit qu'elles étaient pourries ces pistes) et le bain dans la rivière au coucher du soleil est un régal!
Nos sauveurs !!!
Nos sauveurs !!!
Le lendemain, malgré la généreuse proposition des allemands, nous décidons de continuer à vélo. La piste semble s'améliorer un peu mais surtout, elle est plate. Le trajet vers Kazarmann se fait sans encombre mais cette ville nous paraît triste et lugubre. On ressent la dureté du climat sur les bâtiments et ses habitants. En hiver, la température peut atteindre -35˚C et la ville est totalement isolée puisque tous les cols qui y mènent sont bloqués par la neige. 
Nous décidons de ne pas nous y attarder, et tentons le stop pour passer le dernier col : la piste est toujours aussi pourrie et le vent de face s'est levé, anihilant toute trace de motivation pour avancer à vélo. Nous trouvons assez rapidement une voiture prête à nous amener au col, chargeons les vélos dans le coffre et partons à l'assaut des montagnes : montées, descentes, montées, descentes... encore des montagnes russes que nous sommes ravis de ne pas avoir à franchir à vélo. Notre euphorie disparaît totalement, laissant place à un Nico énervé et une Élise dépitée quand notre chauffeur s'arrête au pied du col en nous disant que nous sommes arrivés. Mais c'est pas ce qu'on avait convenu... incompréhension ou arnaque, nous ne saurons jamais (on en a quand même une petite idée qu'on gardera pour nous..). Nous savons juste que nous avons dû allonger plus du tiers de la somme initiale pour nous faire déposer de l'autre côté du col. Bizarrement, l'ambiance était bien plus tendue durant l'ascension. Elle ne se détendra qu'à l'arrivée, lorsque nous croisons une dernière fois le bus d'allemands! 

 

Il nous reste maintenant qu'à descendre cette vallée pour espérer en sortir avant la nuit (notre chauffeur a eu le temps de nous expliquer qu'il y avait des loups dans les parages, ce qui n'enchante pas vraiment Élise). Malgré les 400 m de dénivelés positifs pour "descendre" la vallée et le troupeau de vache qui descend des estives (nous le suivrons pendant près d'une heure avant d'oser le doubler, c'est que les taureaux étaient vraiment en forme et sautaient sur tout ce qui bougeait...) nous trouverons un coin de camping sur les hauteurs de Taran Bazar juste avant la tombée de la nuit.
Camping sur les hauteurs de Taran Bazar, au loin le col passé la veille
Camping sur les hauteurs de Taran Bazar, au loin le col passé la veille

Retour à la civilisation

Le réveil sur la vallée qui s'ouvre enfin est splendide. Notre moral remonte à son maximum 5 km plus tard lorsque nous retrouvons définitivement le bitume et un petit village bien agréable où les gens sont très chaleureux. Les hello des enfants fusent et nous gonflent à bloc pour la seule difficulté de la journée : le passage d'un superbe canyon.

Nous sommes étonnés d'y trouver une carrière et de voir des dizaines de camions défiler dans notre direction. Nous comprendrons quelques kilomètres plus loin qu'ils sont en train de construire une nouvelle route qui à terme devrait relier Kazarman à Jalal Abad. Les kilomètres défilent sur ce boulevard en faux plat descendant! On croise régulièrement des troupeaux qui redescendent dans la vallée pour passer l'hiver. Quel contraste de voir les voitures klaxonner pour les dépasser alors que les bergers mènent le troupeau depuis leurs mini ânes (eh oui, les ânes sont tous petits ici) ou leurs chevaux. On a d'ailleurs vu plusieurs cavaliers chevronnés qui ne devaient pas avoir plus de 5 ou 6 ans.
A mesure que l'on approche de Jalal Abad, les habitations se densifient et le trafic s'intensifie. Nous retrouvons le plaisir de manger dans des petits restos sur la route.
Pause déjeuner juste avant Jalal Abad. Au menu : Shashlik (brochettes) et bière locale!
Pause déjeuner juste avant Jalal Abad. Au menu : Shashlik (brochettes) et bière locale!
Les étapes suivantes sont un peu plus monotones et la chaleur des "plaines" nous fait regretter les montagnes. 
Nous faisons tout de même une halte à Ozgon pour visiter le complexe historique : un mausolée et un minaret du 11ème siècle, d'une très belle architecture. Nous remarquons d'ailleurs que le sud du pays est moins sous influence russe, l'islam est plus présent, et le faciès des gens est très cosmopolite.
Après Ozgon, il devient plus difficile de trouver un spot de camping tranquille : quand nous ne sommes pas près des habitation, l'activité agricole bat son plein. C'est le moment des récoltes : blé, maïs, foin... et les gens s'affairent dans les champs. On retrouve sur les bords de route des étals de tomates, oignons, courges ou pastèques. Chacun semble vendre la production de son potager devant sa porte.

 

Sacré production de courges!
Sacré production de courges!

Il nous tarde d'arriver à Osh, cette portion de route est l'un des axes majeurs, et de fait très passante. On se croirait sur l'une de nos nationales, mais en pire : la plupart des voitures roulent à fond, se doublent jusqu'à trois de front, quand il n'y a pas de visibilité, c'est encore mieux, et les klaxons incessants commencent à nous fatiguer. Nous étions habitués aux klaxons quasi systématiques mais sympathiques (bien qu'un poil agressif, surtout quand une vieille lada à un klaxon de camion) pour nous saluer, mais là, ça devient lassant, ils klaxonnent surtout pour signaler qu'ils doublent ou que t'as plutôt intérêt à te bouger de leur passage. 

La route est en faux plat descendant et on arrive finalement rapidement à Osh, un des plus grans carrefour de la route de la soie,

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Commentaires: 10
  • #1

    Romain (dimanche, 18 septembre 2016 17:38)

    On attendait les premières nouvelles avec impatience, on est servis! Magnifiques photos, je pense que le choix de la piste était le bon, de toute façon c'est une habitude pour Nico de commencer un voyage par le plus difficile j'ai l'impression :-).
    Bravo pour les défis relevés (ya une fete foraine sympa a Osh aussi si cela vous manque ;-) )
    Bon courage pour la suite!

  • #2

    Sylvain & Adeline (dimanche, 18 septembre 2016 22:12)

    Merci pour ces comptes-rendus, on suit vos aventures avec plaisir et enchantement grâce à vos photos.
    En tout cas, ça nous fait plaisir d'avoir de vos nouvelles.
    Bon courage pour la suite ! On pense très fort à vous.
    PS : +1 pour le défi bière locale ;)

  • #3

    Elise (lundi, 19 septembre 2016 04:36)

    On a bien vu la fête foraine de Osh; mais on a pas osé faire un tour dans les machines de l'aire soviétique (la "grande" roue de Bishkek nous a suffit)... On a préféré aller déambuler dans le bazaar ;)

  • #4

    Bruno & Marie (lundi, 19 septembre 2016 19:30)

    Salut les jeunes,
    ça fait plaisir de passer un moment avec vous. Vous nous régalez, vous nous faites rire !!!
    Perso je ne vous envie pas sur vos vélos rigides, trop habitué à mon toussusp, et en plus pédaler sous la pluie ...
    Ne vous inquiétez pas à votre retour on vous fera un repas mouton de la maison, on essaiera de vous faire revivre vos vacances !
    Continuez à vous régaler de tous vos sens, et ... à penser à nous !
    Amitiés

  • #5

    emilie (mardi, 20 septembre 2016 21:21)

    Trop beau!!! ça donne envie! J'adore ce petit minaret. Et vive les overland truckers allemands!

  • #6

    Jean-Luc (jeudi, 22 septembre 2016 23:19)

    Les paysages sont toujours aussi beaux.
    Faire du stop avec des vélos chargés , ça fait rêver ;-)
    J'aime bien les photos de vos deux montures qui broutent l'herbe tranquillement.
    bises à vous deux

  • #7

    Nadine (dimanche, 25 septembre 2016 10:24)

    Les épreuves de la route, c'est pour vous faire encore mieux apprécier les bons moments, courage !
    Les photos sont magnifiques, on a l'impression d'être sur le "porte-bagages", ne vous retournez pas, on est là...
    Bises

  • #8

    Pierre Foucher (dimanche, 25 septembre 2016 19:41)

    Très heureux de ces photos et de ce récit qui vous montrent dans une véritable et magnifique aventure, dans des paysages somptueux et très divers, et dans un environnement humain si différent, tout cela donnant envie de vous imiter ...si cela était possible .Profitez-en bien . Je vous embrasse bien affectueusement . Pierre

  • #9

    Xav (lundi, 03 octobre 2016 22:08)

    Le retour à la civilisation vous permet d'esquiver les tripailles de mouton^^.

    Les gens espèrent vraiment vendre toutes leur courges?

  • #10

    Elise (vendredi, 21 octobre 2016 03:02)

    Ouf, fini le gras de mouton, nous nous regalons maintenant de viande de Yak Tibétain, bien meilleure! et qui sait, peut être bientôt du chien?... En attendant, j'ai bien envie de beaufort, de fondant au chocolat, de raclette, de tarte au citron, de magret, de pain-beurre (pas rance), de jus d'orange (du vrai, pas une de ces satané boissons énergétiques chinoises), de bonne confiture maison, de pâtes bolo avec du gruyère... Oh non, la liste est trop longue...